(suite de l´article du 28 novembre)
On ne parlera pas
ici des sujets qu´ils ont choisis afin d´appliquer leurs théories. Multiples
sont les différences entre le jeune Émile, issu d´un milieu champêtre, choisi
parmi les hommes “vulgaires” et la “belle” Eugénie, issue de la noblesse
d´épée, comme d´ailleurs presque tous les personnages de “La philosophie dans
le boudoir”. On iniste sur le fait que le libertinage est un “privilège” d´une
couche sociale précise. Le peuple, ou
plutôt la “population” (Ibid. p158) est négligée
dans le système sadien. Ce qui nous
intéresse sera la place primordial dont bénéficie
le maître (soit le “précepteur”, soit “l´instituteur”). Selon Rousseau et Sade,
quel sera donc le rôle réservé au maître? Quelle conception celui-ci a-t-il de
la nature?
Rendre son élève heureux, pour sa vie présente
et future, voilà le but ultime du précepteur d´Émile. L´auteur du “Contrat
social” croit que pour y arriver une seule voie est possible, celle de la
vertu.
Il affirme que l´homme naturel, est un
homme préservé des falsifications de la société. Étant né pour vivre avec ses
semblables, l´homme doit connaître les limites des plaisirs. La présence d´un
précepteur est donc indispensable car il saura apprendre à son élève à dompter
ses impulsions. Le seul moyen d´obéir à la nature, sera de ne jamais obéir à
soi-même.
Voyons maintenant comment l´auteur de “Justine” s´oppose à cette “machine
anti-libertine” qu´est l « Émile ». La position extrême défendue par
Rousseau trouvera dans “La philosophie dans le boudoir” une réponse aussi radical.
On soulignera d´emblée que chez Sade,
nous sommes loin d´une préoccupation de sociabilité. L´individu n´est pas à
priori capable des sentiments sociables.
Nous savons que le grand souci des philosophes
au XVIIIème était le raport de l´homme
avec son milieu.
Voyons par exemple Diderot, dans le “Neveu”:
il argumente que l´homme en se conformant à “l´usage” (à ce qui est et non à ce
qui devrait être) non seulement on y trouve son compte, mais il est en outre utile “à ses entours”. Pour lui la
morale se fonde sur l´usage. Il ne faut pas agir autrement que les autres hommes, ni tenter de changer les moeurs, par
exemple, en ne s´y conformant pas. Diderot défend même une maîtrise de soi qui
conduirait à ne plus obéir aux désirs personnels, mais à être capable de
s´adapter à une socièté en faisant quelques sacrifices.
Pour Sade, le conformisme de l´homme à
son milieu est rejeté. Nous sommes devant l´exaltation de l´individu. L´important
est que ce dernier puisse trouver son plaisir, en suivant ou non les normes (
aussi impératives et anciennes soient-elles). Même s´il ne contribue en rien au
bien-être de son prochain (ce langage chrétien est considéré, d´ailleurs, comme
sophistique par le Marquis); on ne lui imputera alors aucune faute puisqu´il en
est satisfait: “…et chacun n´est il pas pour soi dans le monde ?” “La
philosophie dans le boudoir”, Idem, p. 128.
Cet objectif ( le plaisir complet) ne
sera possible qu´à la suite d´une iniciation d´un cours donné par des
libertins philosophes.
(continua)
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